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                               REFLEXIONS sur l'ANTHROPOLOGIE BIBLIQUE

                                            par Pierre Wheeler

     

    Remarques préliminaires

    Le livre des Proverbes, chapitre 3, verset 21 nous invite à garder « la raison et la réflexion ». Selon d'autres versions, la raison signifie : le discernement, la sagesse, le jugement ; la réfléxion : la prudence, la considération. Nous dirions aujourd'hui de « peser le pour et le contre », tout en écoutant la pensée d'autres personnes.

    C'est ce que j'ai essayé de faire dans les paragraphes qui suivent sur l'anthropologie présentée dans l'Ecriture, tout en introduisant d'autres pensées que je n'ai pas découvert dans mes recherches.

    Je voudrais d'abord parler de... 1. L'homme que Dieu a créé, puis, 2. Ce qu'en dit la Bible. Concernant ce deuxième sujet nous constatons une progression dans la Révélation. Tout n'est pas dit dans le deuxième chapitre de la Genèse en rapport avec la création d'Adam, de même que tout n'est pas révélé concernant la Trinité qui est évoquée dans le tout premier chapitre de la Bible. Il en est ainsi pour tout ce que la Bible révèle. La Révélation divine est progressive dans l'Ecriture. Puis, encore, malgré la somme de connaissances présentées actuellement dans la Bible, « nous connaissons (seulement) en partie... », (1 Corinthiens 13. 12).

     

    1. L'homme que Dieu a créé

    La Genèse chapitre 2 explique que Dieu a formé de la terre, le corps d'Adam et qu'Il lui a insufflé dans les narines un souffle vital. Grâce au langage anthropomorphique nous penserions qu'Adam était formé en deux étapes. Louis Berkhof dans sa Théologie systématique propose que lors de la formation du corps d'Adam, Adam était déjà une âme vivante ; « nephesh ». Peut-être.

    Une personne ne possède pas une âme ; elle EST une âme. Une âme qui « loge » dans un corps un certain nombre d'années... Un jour, elle quittera son corps quand le corps ne sera plus capable physiquement de la garder. Lapersonne serait alors absente de son corps. Normalement, le corps sera enterré ou incinéré. Si la personne, absente de son corps appartient au Seigneur, elle sera « avec Christ ». Sinon, la personne attendra dans le séjour des morts le Jugement dernier. Pour celui ou celle qui a accepté Christ en tant que Sauveur, comme Paul l'explique en 2 Corinthiens 5. 8, « il vaut mieux quitter ce corps et demeurer auprès du Seigneur »).

     a) L'origine de l'âme humaine

    Pour la question de l'origine de l'âme d'un nouveau-né, il semble évident que l'âme existe dès la fertilisation de l'ovule. Cette compréhension est appelée le traducianisme. L'hérédité des traits des parents chez leurs enfants semble clairement le confirmer. Au deuxième siècle après J.-C., le père de l'Eglise, Tertullien, serait à l'origine de cette pensée. Ainsi, Tertullien éloignait l'Eglise des idées des philosophes grecs qui croyaient à la préexistence des âmes et/ou à la réincarnation et la transmigration des âmes. Pour les Grecs la mort libérait l'âme de sa prison - le corps.

    L'expression « l'immortalité de l'âme » comme dogme n'est pas strictement biblique. L'homme est mortel. L'enfant de Dieu « revêt l'immortalité », selon 1 Corinthiens 15. 53, lors du retour de Jésus-Christ.

    Les animaux sont aussi appelés « nephesh » dans une trentaine d'endroits dans l'Ancien Testament. Les animaux ont-ils donc une âme ? Si l'âme est le siège des affections, de la volonté et de la raison, oui ; du moins pour les animaux intelligents. Nous constatons ceci par l'observation.

     b) La fonction de l'esprit de l'homme

    Le terme esprit (« ruach ») est rarement appliqué aux animaux (voir Ecclésiaste 3. 19- 21 où l'esprit signifie plutôt « souffle ») ; un peu plus souvent au « vent » (l'atmosphère). Mais il est utilisé principalement en rapport avec Dieu et l'homme.

    L'esprit est l'élément qui existe chez l'homme et qui se manifeste en captant la notion de ce qui est transcendant. L'homme « naturel », qui ne reçoit pas les choses de l'Esprit de Dieu (1 Corinthiens 2. 14) a aussi un esprit. Cette conviction est si forte chez les hommes que les hommes oont inventé de multiples religions qui conçoivent l'existence d'une Transcendance, ou d'êtres transcendants, peut-être d'un Transcendant. Même l'athéisme peut se manifester « religieusement » avec des : « Je crois fermement que Dieu n'existe pas... »1. Homo sapiens est un être religieux. Nous constatons que c'est notamment grâce à son esprit que l'homme, même non-chrétien, est reconnu comme créé à l'image de Dieu (imago Dei), (voir Genèse 9. 6 ; Jacques 3. 9).

    L'autre fonction de l'esprit chez l'homme est manifestée par sa conscience. Conscience d'abord, d'être : « Je suis ». En plus, la conscience distingue entre le bien et le mal ! L'éducation ou le « brain-washing » peut déformer la notion du bien et du mal. Néanmoins, la conscience en rend témoignage concernant la correcte manière de vivre, et, tour à tour, notre conscience nous accuse ou nous défend », (voir Romains 2. 15). Les animaux n'ont pas de conscience d'être, ni la notion du bien ou du mal. L'entraînement peut apprendre à certains un certain comportement « correct », mais naturellement ils vivent selon « la loi de la jungle ». A leur mort, leur souffle s'arrête et disparaît quand leur corps meurt. Mais le souffle de l'homme « monte » pour attendre dans le séjour des morts, après la résurrection, le Jugement dernier. (voir (Ecclésiaste 3 : 19-21) Les hommes « disparus » sont actuellement des « prévenus » dans le séjour des morts, et seront des « déténus » après le Jugement dernier. L'esprit retourne à Dieu qui l'a donné, dit l'Ecclesiaste dans son livre, chapitre 12 verset 7, et 14), tandis que le corps retourne à la terre.

    Nous résumons : nous constatons que l'homme naturel et psychique, possède un élément de sa vie immatérielle qui capte, et croit à la notion de la Transcendance, et que même les athées peuvent comprendre cette croyance. Cet élément s'appelle l'esprit. Pourtant nous voyons nulle part dans le monde animal les manifestations d'un esprit. Une âme, oui ; mais pas un esprit. Car leur âme meurt en même temps que leur corps. Aucun animal n'est à l'image de Dieu.

    2. Qu'en dit la Bible à ce sujet ?

    Nous nous rappellerons que la pleine vérité à ce sujet ne se trouvera pas seulement dans l'Ancien Testament mais dans la Bible complète. Notre connaissance sur le sujet sera limitée si nous ne prenons en considération que l'Ancien Testament.

    Or, un des grands arguments pour soutenir que l'homme est seulement bipartite (la dichotomie) vient de l'Ancien Testament où très souvent les deux termes « âme » (nephesh) et « esprit » (ruach) semblent interchangeables. Nous croyons que c'est ainsi grâce à la figure de rhétorique appelée métonymie. Ame ou esprit, l'un ou l'autre, évoque la partie de l'homme qui est invisible. On dirait que l'Ancien Testament est dichotome, mais un texte comme Esaïe 26, verset 9 dévoile même huit siècles avant J.-C. une différence entre âme et esprit.

    a) L'apport du Nouveau Testament

    Il est un principe de l'herméneutique qui stipule que les textes les plus clairs de l'Ecriture doivent servir de prémisses pour les propositions d'interprétation. Aussi certains textes bien clairs dans le Nouveau Testament nous amènent-ils plus loin dans notre réflexion. Ils introduisent les deux aspects de la partie invisible et immatérielle du chrétien, âme et esprit. Même le professeur Henri Blocher, dichotomiste, dans son article « De l'âme et de l'esprit », (Ichthus, 1986-6, N° 139 : Novembre-Décembre), reconnaît : « Il est permis de distinguer, sans les séparer, un aspect psychique et un aspect spirituel de la vie intérieure ».

    b) Notre Seigneur évoque le rôle de l'esprit

    Généralement notre Seigneur n'introduit pas la distinction entre âme et esprit dans ses discours. Se servant plutôt d'un vocabulaire vétéro-testamentaire il parle davantage de l'âme que de l'esprit. Cependant, en parlant à la Samaritaine, de l'adoration, Jésus précise que cela sera « en esprit et en vérité » (Jean 4. 23). L'adoration sera alors indépendante du temple de Jérusalem et de celui bâti sur le mont Garizim. Elle sera spirituelle. Les chrétiens qui connaissent bien ce précieux verset sont habitués à entendre « en esprit ». Si le Seigneur avait dit : « adorer le Père en âme et en vérité », cela ne serait-il pas plutôt bizarre ? Cela semblerait baisser la signification profonde du terme « adoration ».

    Juste avant le grand cri de victoire « C'est achevé », la dernière parole de notre Sauveur sur la croix semble avoir été : « Père entre tes mains je remets mon esprit » Cette parole signifie la fin de la séparation angoissante pour Jésus de son Père quand Jésus devint un sacrifice pour le péché, (voir 2 Corinthiens 5. 21), et laquelle avait été manifestée par le « Cri de déréliction » : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? » (où Le Fils appelle son Père : « Dieu »). Après donc les heures de séparation du Fils d'avec son Père, le terme « esprit » dans la bouche du Fils évoque de nouveau l'immense profondeur de la pleine communion rétablie entre le Fils et son Père dès que l'oeuvre de l'expiation était pleinement achevée et accomplie.

    c) Mais l'âme bénit Dieu

    Pourtant dans l'Ancien Testament nous avons maintes fois des paroles semblables à ceux du Psaume 103 : 1 : « Mon âme, bénis l'Eternel ». Oui, l'âme humaine est très active pour rendre un culte à Dieu. L'âme, le siège des affections et de la volonté s'élève pour bénir et louer notre Dieu dans la reconnaissance. Notre corps y participe également puisque nous utilisons notre voix, et parfois nos mains qui acclament, ou encore quand nous fléchissons le genou en Sa présence.

    c) L'adoration en esprit et en vérité

    Toutefois, parfois, peut-être au moment de la cène, nous nous prosternons devant Lui en esprit. C'est alors que nous l'adorons « en esprit et en vérité ». Cela se fait généralement dans le silence. N'est-ce pas cela que Jean expérimentait quand il fut « ravi en esprit » et qu'il tombait aux pieds du Seigneur Jésus ? (voir Apocalypse chapitre 1). Et Paul aussi quand il fut ravi jusqu'au troisième ciel ? (2 Corinthiens 12). Ainsi que les trois apôtres sur le mont de la Transfiguration « la face contre terre » ? (Matthieu 17 ; 1-8).

    Au nom du « parallélisme synonyme », construction à la base de la poésie hébraîque, des commentaires se servert de la première phrase du Magnificat de Marie en Luc 1. 46 – 55 pour proposer que l'âme et l'esprit sont synonymes - (« Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit a de l'allégresse en Dieu mon Sauveur »). On le dit un bel exemple du paraellisme de la poésie hébraïque ! Mais ne serait-il pas plutôt un exemple du parallélisme synthétique, voire emblématique, où la deuxième ligne complète la première ligne, la pensée de Marie s'étant élévée dans un domaine plus haut ? Marie loue le Seigneur ; son âme chante. Puis, confondue dans la présence de Dieu son Sauveur, la joie du Saint-Esprit l'inonde et la pénètre. L'esprit de Marie, « absorbe » dans le silence cette joie inexprimable, incommensurable. Son esprit est confondue par les vagues de grâce et d'amour de son Sauveur.

    d) Une distinction entre âme et esprit maintenue

    A part la parole de Paul aux Thessaloniciens (voir 1 Thessloniciens 5. 23) où Paul souhaite que tout notre être, l'esprit, l'âme et le corps, soit conservé sans reproche jusqu'à l'avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, nous pouvons comprendre, voire partager, l'expérience de Marie, éclaircie par Hébreux 4. 12, 13. Grâce à la Parole de Dieu, écrite ou vivante, nous sommes pénétrés et mis « à nu et terrassé aux yeux de Celui à qui nous devons rendre compte ». « L'épée du Seigneur pénètre jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit, elle juge les sentiments et les pensées du cœur ». On se reconnaît alors trichotomiste...

    Conclusion

    La Bible présente-t-elle l'homme comme un être dichotome ou trichotome ? Nous savons qu'il a un corps visible et une âme et/ou un esprit immatériels et invisibles. Si donc un chrétien voit l'homme comme bipartite ou tripartite, dans un sens, peu importe. L'essentiel est de saisir que dans la partie immatérielle de chaque homme il existe une faculté qui capte la notion de la Transcendance et laquelle, pour l'enfant né de Dieu, le met en contact permanent avec son Père céleste, car son esprit a été vivifié par le Saint-Esprit.

     

    Il s'y trouve aussi chez l'homme un aspect psychique, essentiel pour la vie ici-bas de tous les jours mais avec lequel le chrétien peut aussi chanter les louanges du Seigneur. Cependant, mener sa vie chrétienne uniquement selon l'âme peut nous amener à vivre charnellement, alors que le Saint-Esprit veut que nous vivions comme des hommes et des femmes spirituels, « jugeant de tout », et « ayant la pensée de Christ », (voir 1 Corinthiens 2. 14-16).

    Ainsi le Seigneur Jésus-Christ sera avec notre esprit, selon la parole de bénédiction exprimée à la fin de quelques lettres de l'apôtre Paul.

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    Quelques textes bibliques qui touchent à la vie spirituelle selon l'esprit :

    Matthieu 17. 1-8 ; Jean 4. 20-24 ; Romains 8. 4-17 ; 1 Corinthiens 2. 12-16  et 3. 1-15 ; Ephésiens 3. 14-21 ; Hébreux 4. 8-13.

     

    Bibliographie : 

    Plusieurs Théologies systématiques :  

    Louis Berkhof ; Wade Grudem ; Henry C. Thiessen ; Millard Erickson ; Augustus Strong,

    Et des dictionnaires théologiques :

    Evangelical Dictionary of Theology (éditeur : Walter Elwell) ;

    Dictionnaire Encyclopédique de la Bible (editeur : Alexandre Westphal) ;

    Vocabulaire Biblique (éditeur : J.-J.von Allmen)

    New Dictionary of Theology (éditeurs : S.B. Ferguson ; D.F. Wright)

     

    (ainsi que plusieurs commentaires). 

     

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                                                             (Pierre Wheeler, juin 2014).

     

    1 Les raisons données pour ne pas croire en Dieu ou en un Designer super-intelligent sont parfois puériles ; oui, même celles des scientifiques.


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